D’après Blaszczynski et Nower (Revue Addictions 97 :487-499, 2002), il existe trois types de joueurs pathologiques, identifiés selon un modèle « évolutif » :
- les joueurs « conditionnés », ayant souvent connu des problèmes de jeux dans leur famille ;
- les joueurs « vulnérables émotionnellement », qui se caractérisent par un comportement dépressif et anxieux ;
- et les joueurs « antisociaux impulsifs », qui présentent en plus des comportements antisociaux et/ou impulsifs.
Afin de valider la pertinence de ces groupes, une étude portant sur 372 joueurs pathologiques (cohorte JEU de cas témoins suivis sur 5 ans) a été menée par des équipes du Centre Médical Marmottan – GPS Perray-Vaucluse, du CHU de Nantes, de l’Université Paris-Ouest Nanterre la Défense, de l’Hôpital Louis Mourier de Colombes (AP-HP), du CH Sainte-Anne et de l’Hôpital Universitaire Sainte-Marguerite de Marseille. Les joueurs pathologiques ont été classés en groupes correspondant à ceux pré-cités, et soumis à des entretiens cliniques structurés portant sur différents critères : habitudes de jeux, caractéristiques socio-démographiques, croyances et attitudes face au jeu, profil psychopathologique, troubles l’attention, etc.
Une classification de joueurs excessifs pertinente mais à explorer
Les résultats de cette étude tendent à montrer que les caractéristiques et les pratiques des trois groupes de joueurs varient. Si les résultats de l’étude semblent valider l’existence des groupes définis par Blaszczynski et Nower, il apparaît que les groupes de joueurs « vulnérables émotionnellement » et « antisociaux impulsifs » présentent des caractéristiques différentes. A l’opposé, le groupe des joueurs « conditionnés » se situe entre les deux autres et peut difficilement être isolé.
Des pratiques de jeux différentes, influencées par les voies d’entrée dans le jeu
Concernant les pratiques de jeux, on note ainsi que les joueurs « antisociaux impulsifs » préfèrent les jeux reposant en partie sur des compétences (jeux de courses, paris sportifs), tandis que les joueurs « vulnérables émotionnellement » sont significativement attirés par les jeux de hasard (bandit manchot, jeux de grattage). Les joueurs « conditionnés » se situent entre les deux autres groupes et pratiquent pour la moitié d’entre eux les jeux de hasard et pour l’autre moitié les jeux reposant en partie sur des compétences ou des jeux de stratégie.
Deux grandes fonctions psychologiques de l’addiction au jeu
Les auteurs de l’étude proposent une présentation dimensionnelle de cette classification, entre impulsivité et automédication. D’un côté, les joueurs impulsifs, dont le profil ressemble à celui des toxicomanes, préfèrent le poker et les paris sportifs ; de l’autre, des personnes déprimées, anxieuses, jouent dans une optique d’automédication et préfèrent les jeux de hasard purs. Le groupe des joueurs conditionnés serait simplement un groupe intermédiaire.
Cette classification se rapproche d’autres modèles définis dans le domaine des addictions, notamment à l’alcool. L’impulsivité, l’automédication et le conditionnement peuvent être des facteurs décisifs dans toutes les formes d’addiction, avec ou sans substance. D’autres études pourraient permettre d’explorer davantage cette interprétation « fonctionnelle » des voies d’entrée dans les addictions.
Retrouvez l’intégralité de la recherche dans l’article publié dans Journal of Gambling Studies (en anglais, accès payant) :
« Towards a Validation of the Three Pathways Model of Pathological Gambling »